Aller au contenu

La fontaine du Pélican

Ah, la Fontaine du Pélican, ce témoin aujourd’hui silencieux mais ô combien bavard de l’histoire tumultueuse de mon petit coin de Provence ! Imaginez une fontaine qui a tout vu, tout entendu et tout supporté, avec plus de résilience qu’un super-héros de bande dessinée.

Construite fièrement en 1770, au centre de la place Cabardel, cette fontaine est érigée sur un piédestal en pierre de Calissanne. Cette structure est ornée d’une colonne de pierres de Saint Laurent sur laquelle trône un pélican majestueux, entouré de ses oisillons. Son bassin est en forme de trèfle et un petit lavoir est aménagé à ses pieds.

Son eau, précieuse et convoitée, était captée près de la croix de Mission au chemin des Miroirs et au Château de Piquette, et acheminée par un aqueduc souterrain. On aurait dit que l’eau venait de quelque source magique.

Il faut dire qu’à ses débuts, la fontaine avait de quoi faire jaser tout le village. C’était le théâtre de toutes sortes de disputes, d’abord, ce sont les lavandières entre elles qui se disputait l’espace. Mais ces ménagères avaient vite fait de se rabibocher pour défendre leur territoire quand il s’agissait de s’opposer aux propriétaires de bétail qui y laissaient abreuver leurs bêtes, alors que ces dames rinçaient le linge. Imaginez la scène : les lavandières, armées de leurs battoirs, défendant leur espace de lavage contre des troupeaux de bêtes assoiffées !

En 1863 fin des pugilats, le lavoir de la fontaine disparaît, il sera avantageusement remplacé par le lavoir des Passadouîres.

Et puis, la fontaine a connu des moments encore plus dramatiques : la Révolution Française, le terrible tremblement de terre de Provence en 1909, les guerres mondiales, elle a même été blessé par le passage des chars américain lors de la libération. Mais malgré tout cela, pendant trois siècles, elle a toujours su garder sa dignité et remplir son office, comme un bon vieux majordome britannique impassible. Il y en a même qui se souviennent qu’a l’occasion de certaines fêtes, elle a contribué à la liesse populaire en pourvoyant aux libations des Pélissannais qui eurent le plaisir de pouvoir s’y servir du vin.

Cependant, depuis 2004, les choses se sont compliquées. Pour permettre la restauration de sa magnificence l’eau a été coupée, puis remise, puis recoupée…C’était comme un jeu de cache-cache entre la fontaine et l’eau ! À un moment, des eaux usées se sont même mélangées à l’eau de source, transformant la fontaine en une sorte de potion magique douteuse.

En 2006, un autre changement notable est apparu dans la qualité de l’eau, il semblait que c’était l’eau du canal de Craponne qui coulait des quatre canons de la fontaine. Et puis, en 2007, lors de la taille des platanes, une branche a brisé un des canons, qui a ensuite mystérieusement disparu. On aurait pu croire à un complot orchestré par les arbres eux-mêmes !

En septembre 2007, la fontaine et le lavoir des Passadouïres se sont retrouvés à sec, abandonnés pendant dix mois. Mais le 26 juin 2008, à 06h00 du matin, Pélissanne s’est réveillée pour découvrir que la fontaine coulait à nouveau ! Cependant, à certains moments de forte chaleur, des effluves de chlore s’échappaient du bassin, ajoutant une touche de mystère à cette eau déjà capricieuse.

Pour couronner le tout, l’eau a commencé à s’arrêter de couler tous les jours de minuit à 06h00, comme si la fontaine avait décidé de prendre des pauses syndicales bien méritées !

Enfin, aujourd’hui, depuis l’été 2021, la vaillante fontaine de Pelissanne ne coule plus du tout. Peut-être qu’elle en a assez vu et qu’elle a décidé de prendre une retraite bien méritée. Peut-être que son secret s’est perdu. Le mystère reste entier mais n’a pas fin de faire couler de l’encre.

Quoi qu’il en soit, elle demeure un monument historique, témoin d’une saga digne des plus grands feuilletons. On espère qu’un jour, elle reviendra à la vie et continuera à raconter ses histoires, avec toute la sagesse et l’humour qui la caractérisent.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *